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Jack l’Eventreur ou le sexisme sexy

Je suis tombée par hasard sur cet article, qui déconstruit le mythe de Jack l’Eventreur, tueur de prostituées, par le prisme des réalités sociales de l’ère Victorienne.

On y apprend qu’après des recherches plus poussées, rien ne permet d’affirmer que les victimes du tueur étaient des prostituées. Des femmes sans-abri, pour certaines, mais pas des prostituées.

Simplement, un cadavre de femme célibataire, à cette belle époque, on l’étiquetait « pute ». D’une part ça permettait de pas trop se casser la nénette à faire un travail de recherche (coucou la police de l’époque), d’autre part ça nourrissait les journaux de gros titres bien gras. Le massacre des prostituées, ça fait vendre. Et puis ça permet de remettre les choses en place : les mauvaises femmes sont punies.

Jackounet aurait porté ses couilles et aurait déglingué de la bourgeoise, il ne serait pas actuellement un des monstres les plus sexy de l’histoire de l’humanité, et son histoire serait considérée comme celle d’un gros dégueulasse, pas celle d’un mystère encore parfumé de relents d’opium et de dentelle poudrée. On l’aurait d’ailleurs sûrement retrouvé.

Et quand bien même, notez qu’après tout ce temps, comme Ted Bundy dont on fait des films, c’est lui, la rock star.

C’est lui que les gens aiment, adulent, recherchent. C’est son nom en lettre dorées qui fait vendre des millions de bouquins fantasmés, des fictions sans aucune base ni respect. C’est lui qu’on admire un peu, au fond.

Ses victimes, simples femmes, simples putes, sont tombées dans l’oubli.
Elles l’avaient certainement un peu cherché.

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Simetierre 2019

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En retard de plusieurs mois, la meuf, on vous dit.
BREFFEUH.

Attention comme toutes mes chroniques, un peu de spoil dans cet article 🙂 

Y’a genre deux-trois mois est sorti (quelle surprise en cette période de remakes à la pelle), un nouveau « Simetierre ». Réalisé par Kevin Kölsch et Dennis Widmyer, que je ne connais pas plus que ça je vous avoue. Je check IMDB et constate qu’ils sont habitués à bosser en duo. Why not.

Comme chaque fois, j’ai soigneusement évité les bandes-annonces et spoilers, je vais donc me caler dans la salle de cinéma avec un enthousiasme mêlé de petite pointe d’inquiétude (pitié, ne massacrez pas ENCORE Stephen King, dont les adaptations sont quand même en grande majorité pas terribles… )

Le regain d’intérêt pour les années 80 (Strangers Things mania oblige) me fait tout de même espérer que le job soit fait correctement, d’autant que Simetierre, tout comme « Ca », fait partie de ces films cultes qui, il faut l’admettre, ne vieillissent pas forcément très bien. Je ne souhaite donc pas commencer la séance avec un a priori trop négatif : wait and see.

La forêt est vue de dessus. Plan drone qui permet de voir l’étendue d’arbres, et déjà l’isolement. Très joli, très sombre. Pour peu qu’on soit un vrai citadin, il y a de quoi donner le vertige, tous ces arbres, sans aucune présence humaine, juste cette route qui serpente, angoissante, déjà menaçante, surtout si on a lu le bouquin.
On sait, dès le début, qu’on va aller vers une horreur très esthétisée.

La famille s’installe dans sa nouvelle maison, tout ça. Je reconnais des acteurs que j’aime bien.

Une procession d’enfants masqués va enterrer un chien au « simetierre » des animaux.
Une mise en place de l’intrigue également très bien vue esthétiquement, un petit côté « Silent Hill » pour réveiller la vieille histoire que la plupart des spectateurs connaissent déjà : bien vu.

Je ne vais pas détailler tout le pitch, qui est sensiblement identique au livre ET au premier film. Les acteurs sont justes, attachants, pas mièvres, pas ridicules.
Certains accents ont été oubliés, comme la relation détestable du héros Louis à sa belle-famille, ce qui est un peu dommage.
Certains détails ont été adoucis, comme le passif de la mère Rachel avec sa soeur malade. Bien qu’il serve de prétexte à quelques scènes bien sales, on manque un peu la profondeur du trauma, la violence qui accompagne finalement chacun de ses pas sans jamais la lâcher. Mais le personnage est bien campé, douloureux sans être hystérique, jamais ridicule.

UN gros détail est changé, ce qui est surprenant mais pas insupportable : c’est la petite fille Ellie, et non son petit frère Gage, qui se fait percuter par le camion.
D’ordinaire, je suis assez puriste sur les scénarii, mais j’ai moi-même eu la surprise de ne pas vraiment être dérangée par ce twist : d’une part, il « réveille » le spectateur qui connaît déjà par coeur l’histoire. D’autre part, il ne change pas réellement le déroulé ni le coeur de l’histoire : notre rapport à la mort, l’horreur de perdre un enfant, la lente descente dans la folie du père prêt à tout pour entretenir son déni.
Un petit électrochoc finalement pas inintéressant, avec en plus une petite profondeur sympathique proposée au spectateur, puisque contrairement à Gage qui a un an et des brouettes, Ellie a huit ans… elle sait donc parler.

Du pantin maléfique à la jeune zombie pleine de rage, on glisse donc dans une autre perspective qui apporte son lot de questions mais aussi de réponses. L’horreur de la mort, de l’abandon, la rage aveugle de chercher à tout prix un coupable, c’est ce qui transforme les défunts en monstres assoiffés de vengeance.

Une très belle fin plie le film avec succès, pire encore que celle du bouquin.

A titre personnel, je regrette toujours le PEGI 13 qui pour moi ne convient pas aux oeuvres de Stephen King. Non que je souhaite le gore pour le gore, bien au contraire. Mais je trouve que quand on choisit d’adapter des histoires d’horreur, on accepte l’idée que le film ne sera PAS tout public.
Les producteurs, par souci de rentabilité, édulcorent à foison, et c’est épuisant.
L’histoire racontée ici touche au tabou le plus absolu de l’humanité : le film devrait nous laisser perturbés. Gênés. Mal.
Soyons honnêtes, ce n’est pas le cas.

Ce point ayant été ENCORE abordé, je tiens à rester objective et surtout positive.

Ce Simetierre n’est pas le film de l’année, mais dépoussière avec bio un classique difficile à aborder puisque déjà très qualitatif. Une photographique impeccable, des acteurs justes et sympathiques : un sans-faute. Mettez votre masque de lapin et allez traîner dans les sous-bois, un couteau à la main.